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convaincue que je ne vous ferai pas ce plaisir-là ; pour des mortifications, vous en aurez ; elles ne vous manqueront pas, j’en fais vœu, mais voilà tout.

Mon vœu me porta malheur, il ne faut jamais jurer de rien. Malgré mes louables résolutions, elle m’excéda tant un jour, me dit dévotement des choses si piquantes, enfin le diable me tenta si bien, qu’au souvenir de ses impertinences et du soufflet qu’elle avait donné à Nanette à cause de moi, il m’échappa de lui en donner un en présence de quelques témoins de ses amis.

Cela partit plus vite qu’un éclair ; elle sortit sur-le-champ, m’attaqua en justice, et depuis ce temps-là nous plaidons à mon grand regret : car cette sainte personne, en dépit du commis que j’ai mis sur son compte, et qu’il a bien fallu citer, pourrait bien gagner son procès, si je ne trouve pas de puissants amis, et je vais en chercher à Versailles.

Ce soufflet-là m’inquiète pour vous, lui dit notre jeune homme quand il eut fini ; je crains qu’il ne nuise à votre cause. Il est vrai que ce commis est un article dont je n’ai pas meilleure idée que vous ; je vous crois assurément très maltraité à cet égard, mais c’est une affaire de conscience que vous ne sauriez prouver, et ce malheureux soufflet a eu des témoins.

Tout doux, monsieur, répondit l’autre d’un air chagrin, laissons là les réflexions sur le commis, s’il vous plaît, je les ferai bien moi-même, sans que personne les fasse : ne vous embarrassez pas, le soufflet