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Neuf, et c’était dans la tabatière de ce petit drôle qu’on venait bien poliment de prendre du tabac ; c’était à lui qu’on avait dit : Monsieur n’a que vingt ans ; oh voyez si c’était la peine de le prendre sur ce ton-là avec le personnage, et si Mme de Fécour ne devait pas rire d’avoir été la dupe de ma mascarade.

Mais je n’avais rien à craindre, nous avions affaire à une femme sur qui toutes ces choses-là glissaient, et qui ne voyait jamais que le présent et point le passé. J’étais honnêtement habillé, elle me trouvait avec Mme de Ferval, il ne m’en fallait pas davantage auprès d’elle, sans parler de ma bonne façon, pour qui elle avait, ce me semblait, une singulière estime ; de sorte que, continuant son discours tout aussi rondement qu’elle l’avait commencé : Ah ! c’est monsieur, reprit-elle, qui a épousé cette Mlle Habert, une fille dans la grande dévotion, à ce qu’on disait, cela est plaisant ; mais, monsieur, il n’y a donc que deux jours tout au plus que vous êtes marié ? car cela est tout récent.

Oui, madame, lui dis-je, un peu revenu de ma confusion, parce que je voyais qu’il n’en était ni plus ni moins avec elle, je l’épousai hier.

Tant mieux, j’en suis charmée, me répondit-elle ; c’est une fille un peu âgée, dit-on, mais elle n’a rien perdu pour attendre ; vraiment, ajouta-t-elle en se tournant du côté de Mme de Ferval, on m’avait bien dit qu’il était beau garçon, et on avait raison ; si je connaissais la demoiselle, je la féliciterais ; elle a