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Quand vous lui plaisiez, par exemple, cette gorge dont j’ai parlé, il semblait qu’elle vous la présentât, c’était moins pour tenter votre cœur que pour vous dire que vous touchiez le sien ; c’était une manière de déclaration d’amour.

Mme de Fécour était bonne convive, plus joyeuse que spirituelle à table, plus franche que hardie, pourtant plus libertine que tendre ; elle aimait tout le monde, et n’avait d’amitié pour personne ; vivait du même air avec tous, avec le riche comme avec le pauvre, avec le seigneur comme avec le bourgeois, n’estimait le rang des uns, ni ne méprisait le médiocre état des autres. Ses gens n’étaient point ses valets ; c’étaient des hommes et des femmes qu’elle avait chez elle ; ils la servaient, elle en était servie ; voilà tout ce qu’elle y voyait.

Monsieur, que ferons-nous ? vous disait-elle ; et si Bourguignon venait : Bourguignon, que faut-il que je fasse ? Jasmin était son conseil, s’il était là ; c’était vous qui l’étiez, si vous vous trouviez auprès d’elle ; il s’appelait Jasmin, et vous monsieur : c’était toute la différence qu’elle y sentait, car elle n’avait ni orgueil ni modestie.