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qu’il vous est contraire ? Saurait-il mauvais gré à sa mère de l’amitié qu’elle a pour vous ?

Non, lui dis-je, ce n’est point cela ; écoutez-moi. M. de Valville est le jeune homme dont je vous ai parlé aussi, chez qui on me porta après ma chute, et qui prit dès lors pour moi la passion la plus tendre, une passion dont je n’ai pu douter. Bien plus, Mme de Miran sait qu’il m’aime, et que je l’aime aussi, sait qu’il veut m’épouser, et malgré mes malheurs consent elle-même à notre mariage qui doit se faire au premier jour, qui a été retardé par hasard, et qui peut-être ne se fera plus ; j’ai du moins lieu d’en désespérer par la conduite que Valville tient actuellement avec moi.

Mlle Varthon ne m’interrompait plus, écoutait d’un air morne, baissait la tête, et même ne me regardait pas ; je ne la voyais que de côté, et cette contenance qu’elle avait, je l’attribuais à la simple surprise que lui causait mon récit.

Vous savez de quel danger je sors, continuai-je, je viens d’échapper à la mort ; avant ma maladie, jamais sa mère ne m’écrivait le moindre billet qu’il n’en joignît un au sien, ou qu’il ne m’écrivît quelque chose dans sa lettre. Et ce même homme qui m’a accoutumée à le voir si tendre et si attentif, lui qui a pensé me perdre, qui a dû être si alarmé de l’état où j’étais, lui qu’à peine j’aurais cru assez fort pour supporter ses frayeurs sur mon compte, qui a dû être si transporté de joie de me voir hors de péril, croiriez-vous, mademoiselle, que je suis encore