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ce fut ce qui la guida dans la recherche qu’elle fit de sa fille.

Il fallait bien que mon histoire eût percé ; Mme de Fare avait infailliblement parlé ; cette dame longue et maigre avait été instruite ; elle était méchante et glorieuse ; le discours qu’elle m’avait tenu au couvent marquait de mauvaises intentions ; c’était elle apparemment qui avait ameuté les parents, qui les avait engagés à se remuer, pour se garantir de l’affront que Mme de Miran allait leur faire en me mettant dans la famille ; et ma disparition ne pouvait être que l’effet d’une intrigue liée entre eux.

Mais m’avaient-ils enlevée de leur chef ? car ils pouvaient n’y avoir employé que de l’adresse. Leur complot n’était-il pas autorisé ? Avaient-ils agi sans pouvoir ?

Un carrosse m’était venu prendre ; quelle livrée avait le cocher ? Cette femme qui s’était dite envoyée par ma mère pour me tirer du couvent, quelle était sa figure ? Mme de Miran et son fils s’informent de tout, font d’exactes perquisitions.

La tourière du couvent avait vu le cocher ; elle se ressouvenait de la livrée ; elle avait vu la femme en question, et en avait retenu les traits, qui étaient assez remarquables. C’était un visage un peu large et très brun, la bouche grande et le nez long : voilà qui était fort reconnaissable. Aussi ma mère et son fils la reconnurent-ils pour l’avoir vue chez Mme de…, femme du ministre, et leur parente ; c’était une de ses femmes.