Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/409

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qui eût la cruauté de me traiter aussi mal que je l’ai fait moi-même ; et je ne comprends pas, après tout ce que j’ai avoué, comment Mme de Miran et M. de Valville ne m’ont pas laissée là. Je devais les faire fuir ; je défierais qu’on imaginât une personne plus chétive que je me la suis rendue ; ainsi il n’y a plus rien à m’objecter à cet égard. On ne saurait me mettre plus bas, et les répétitions ne serviraient plus qu’à accabler une fille si affligée, si à plaindre et si infortunée, que vous, madame, qui êtes abbesse et religieuse, vous n’avez point d’autre parti à prendre que d’avoir pitié de moi, et que de refuser d’être de moitié avec les personnes qui me persécutent, et qui me font un crime d’un amour dont il n’a pas tenu à moi de guérir M. de Valville, et qui est plutôt un effet de la permission de Dieu que de mon adresse et de ma volonté. Si les hommes sont si glorieux, ce n’est pas à une dame aussi pieuse et aussi charitable que vous à approuver leur mauvaise gloire ; et s’il est vrai aussi que j’aie beaucoup de mérite, ce que je n’ai pas la hardiesse de croire, vous devez donc trouver que j’ai tout ce qu’il faut. M. de Valville, qui est un homme du monde, ne m’en a pas demandé davantage, il s’est bien contenté de cela. Mme de Miran, qui est généralement aimée et estimée, qui a un rang à conserver aussi bien que ceux qui me nuisent, et qui n’aimerait pas plus à rougir qu’eux, s’en est contentés de même, quoique j’aie fait tout mon possible afin qu’elle ne se contentât point. Elle le sait, cependant la mère et le