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arrangé, qui rejaillit sur l’âme, et qui est comme une image de sa pureté, de sa paix, de sa satisfaction, et de la sagesse de ses pensées.

Dès que je fus seule avec cette dame : mademoiselle, asseyez-vous, je vous prie, me dit-elle. Je pris donc un siège. On me l’avait bien dit, ajouta-t-elle, qu’on se prévient tout d’un coup en votre faveur ; il n’est pas possible, avec l’air de douceur que vous avez, que vous ne soyez extrêmement raisonnable ; toutes mes religieuses sont enchantées de vous. Dites-moi, comment vous trouvez-vous ici ?

Hélas ! madame, lui répondis-je, je m’y trouverais fort bien, si j’y étais venue de mon plein gré ; mais je n’y suis encore que fort étonnée de m’y voir, et fort en peine de savoir pourquoi on m’y a mise.

Mais, me repartit-elle, n’en devinez-vous pas la raison ? Ne soupçonnez-vous point ce qui en peut être cause ? Non, madame, repris-je ; je n’ai fait ni de mal ni d’injure à personne.

Eh bien ! je vais donc vous apprendre de quoi il s’agit, me répondit-elle, ou du moins ce qu’on m’a dit là-dessus, et ce que je me suis chargée de vous dire à vous-même.

Il y a un homme dans le monde, homme de condition, très riche, qui appartient à une famille des plus considérables, et qui veut vous épouser ; toute cette famille en est alarmée, et c’est pour l’en empêcher qu’on a cru devoir vous soustraire à sa vue. Non pas que vous ne soyez une fille très sage et très vertueuse, de ce côté-là, on vous rend pleine justice, ce