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je ne sais pas vos desseins, madame, repris-je à mon tour ; mais ce serait bien mal fait à vous si vous veniez ici pour me surprendre. Elle ne me répondit rien, et acheva de descendre.

Qu’est-ce que cela signifie ? m’écriai-je toute seule, et à quoi tend une visite si extraordinaire ? Est-ce encore quelque orage qui vient fondre sur moi ? Il en sera tout ce qu’il pourra, mais je n’y entends rien.

Et là-dessus je retournai à ma chambre, dans la résolution d’informer Mme de Miran de ce nouvel accident ; non que je crusse qu’il y eût du mal à ne lui rien dire ; car de quelle conséquence cela pourrait-il être ? je n’y en voyais aucune : mais il y aurait toujours eu quelque mystère à ne lui en point parler ; et ce mystère, tout indifférent qu’il me paraissait, je me le serais reproché, il me serait resté sur le cœur.

En un mot, je n’aurais pas été contente de moi. Et puis, me direz-vous, vous ne couriez aucun risque à être franche ; vous deviez même y avoir pris goût, puisque vous ne vous en étiez jamais trouvée que mieux de l’avoir été avec Mme de Miran, et qu’elle avait toujours récompensé votre franchise.

J’en conviens, et peut-être ce motif faisait-il beaucoup dans mon cœur ; mais c’était du moins sans que je m’en aperçusse, je vous jure, et je croyais là-dessus ne suivre que les purs mouvements de ma reconnaissance.

Quoi qu’il en soit, j’écrivis à Mme de Miran. Mardi, à telle heure, lui disais-je, est venue me voir