Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/377

Cette page n’a pas encore été corrigée

tout avoué ; mais je m’en suis abstenu. C’est un détail, vous me permettrez de le dire, qui n’est pas fait pour un esprit comme le sien. Quoi qu’il en soit, mademoiselle, elle vous aime, vous avez du pouvoir sur elle, tâchez d’obtenir qu’elle se taise ; dites-lui que ma mère le lui demande en grâce, et que, si elle y manque, c’est se déclarer notre ennemie, et m’outrager personnellement sans retour. Enfin, ma chère cousine, dites-lui l’intérêt que vous prenez à ce qui nous regarde, et tout le chagrin qu’elle ferait à vous-même, si elle ne nous gardait pas le secret.

Ne vous inquiétez point, lui repartit Mlle de Fare, elle se taira, monsieur, je vais tout à l’heure me jeter à ses genoux pour l’y engager, et j’en viendrai à bout.

Mais du ton dont elle nous le promettait, on voyait bien qu’elle souhaitait plus de réussir qu’elle ne l’espérait, et elle avait raison.

Pendant qu’ils s’entretenaient, ainsi, je soupirais, et j’étais consternée. Il n’y a plus de remède ! m’écriais-je quelquefois ; nous n’en reviendrons point. Et en effet, qui n’aurait pas pensé que cet événement-ci romprait notre mariage, et qu’il en naîtrait des obstacles insurmontables ?

Et si Mme de Miran les surmonte, me disais-je en moi-même, si elle a ce courage-là, aurai-je celui d’abuser de toutes ses bontés, de l’exposer à tout le blâme, à tous les reproches qu’elle. en essuiera de sa famille ? Pourrai-je être heureuse, si mon bonheur