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elles contribuent à vous soutenir dans l’imagination des hommes.

Et c’était dans ce sens-là que Mme Dorsin les avait. Les autres les ont par vanité, et elle ne les avait qu’à cause de la vanité des autres.

Je vous ai dit que je serais long sur son compte, et comme vous voyez, je vous tiens parole.

Encore un petit article, et je finis ; car je renonce à je ne sais combien de choses que je voulais dire, et qui tiendraient trop de place.

On peut ébaucher un portrait en peu de mots ; mais le détailler exactement comme je vous avais promis de le faire, c’est un ouvrage sans fin. Venons à l’article qui sera le dernier.

Mme Dorsin, à cet excellent cœur que je lui ai donné, à cet esprit si distingué qu’elle avait, joignait une âme forte, courageuse et résolue ; de ces âmes supérieures à tout événement, dont la hauteur et la dignité ne plient sous aucun accident humain ; qui retrouvent toutes leurs ressources où les autres les perdent ; qui peuvent être affligées, jamais abattues ni troublées ; qu’on admire plus dans leurs afflictions qu’on ne songe à les plaindre ; qui ont une tristesse froide et muette dans les plus grands chagrins, une gaieté toujours décente dans les plus grands sujets de joie.

je l’ai vue quelquefois dans l’un et dans l’autre de ces états, et je n’ai jamais remarqué qu’ils prissent rien sur sa présence d’esprit, sur son attention pour les moindres choses, sur la douceur de ses manières, et