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que j’aie jamais connue ; et de mon côté j’avais le cœur bon, comme je l’ai encore.

Le curé entra là-dessus. Qu’est-ce ? dit-il à sa sœur, je crois que Marianne pleure. Elle lui dit alors ce dont nous parlions, et le dessein qu’elle avait de me mener à Paris avec elle. Je le veux bien, dit-il ; mais si elle y reste, nous ne la verrons donc plus, et cela me fait de la peine, car je l’aime, la pauvre enfant. Nous l’avons élevée, je suis bien vieux, et ce sera peut-être pour toujours que je lui dirai adieu.

Il n’y avait rien de si touchant que cet entretien, comme vous le voyez. Je ne répondis point au curé, mais en revanche, je me mis à sangloter de toute ma force. Cela les attendrit encore davantage, et le bonhomme alors s’approchant de moi : Marianne, me dit-il, vous partirez avec ma sœur, puisque c’est pour votre bien, et que je dois le préférer à tout. Nous vous avons tenu lieu de vos parents que Dieu n’a pas permis que vous connussiez, non plus que personne de votre famille ; ainsi, ne faites jamais rien sans nous consulter pendant que nous vivrons ; et si ma sœur vous laisse bien placée à Paris, sans quoi il faut que vous reveniez, écrivez-nous dans toutes