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vouloir égarer les autres ; et elle aimait mieux qu’on manquât de sagesse que de caractère ; qu’on eût le cœur faible, que l’esprit impertinent et corrompu.

Mme de Miran avait plus de vertus morales que de chrétiennes, respectait plus les exercices de sa religion qu’elle n’y satisfaisait, honorait fort les vrais dévots sans songer à devenir dévote, aimait plus Dieu qu’elle ne le craignait, et concevait sa justice et sa bonté un peu à sa manière, et le tout avec plus de simplicité que de philosophie. C’était son cœur, et non pas son esprit qui philosophait là-dessus. Telle était Mme de Miran, sur qui j’aurais encore bien des choses à dire ; mais à la fin, je serais trop longue ; et si par hasard vous trouvez déjà que je l’aie été trop, songez que c’est ma bienfaitrice, et que je suis bien excusable de m’être un peu oubliée dans le plaisir que j’ai eu de parler d’elle.

Il vous revient encore un portrait, celui de la dame avec qui elle était ; mais ne craignez rien, je vous en fais grâce pour à présent, et en vérité je me l’épargne à moi-même ; car je soupçonne qu’il ne sera pas court non plus, qu’il ne sera pas même aisé, et il est bon