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sur l'Ile des esclaves


non moins amusante est celle où Cléanthis et Arlequin essaient, en présence de leurs nouveaux esclaves, de prendre les grands airs et les belles manières, et de se faire l'amour comme le font les honnêtes gens. Ils finissent par convenir entre eux qu’Arlequin fera une déclaration amoureuse à Euphrosine et que Cléanthis en arrachera une à Iphicrate, au moyen de ces petites avances que peut bien se permettre une fille suivante devenue femme de qualité. À ce coup, l’orgueil d’Iphicrate et d’Euphrosine éclate en plaintes bien légitimes ; Arlequin se repent le premier d’avoir poussé si loin la confiance tant soit peu insolente qui lui venait de son titre imprévu, et son maître avoue aussi alors qu’il eut de grands torts envers lui autrefois. Cléanthis et Euphrosine imitent ce double exemple, avec moins d’abandon et tout en se permettant quelques récriminations ; ce sont des femmes qui se réconcilient. Tout le monde s’embrasse et pleure. Survient l’honnête Trivelin, qui, justement enchanté de ce spectacle édifiant, embrasse aussi les naufragés, et leur déclare qu’ils pourront partir dans deux jours pour Athènes.

L’Ile des Esclaves eut vingt-une représentations consécutives, et chacune d’elles fut remarquable par l'affluence du public.