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de ton maître ; car on dit qu’il est grand seigneur.

ARLEQUIN

Il a l’air d’un garçon de famille.

HORTENSE

Tu me réponds comme si tu ne savais pas qui il est.

ARLEQUIN

Non, je n’en sais rien, de bonne vérité. Je l’ai rencontré comme il sortait d’une bataille ; je lui fis un petit plaisir ; il me dit grand merci. Il disait que son monde avait été tué ; je lui répondis : tant pis. Il me dit : tu me plais, veux-tu venir avec moi ? Je lui dis : tope, je le veux bien. Ce qui fut dit, fut fait ; il prit encore d’autre monde ; et puis le voilà qui part pour venir ici, et puis moi je pars de même, et puis nous voilà en voyage, en courant la poste, qui est le train du diable ; car parlant par respect, j’ai été près d’un mois sans pouvoir m’asseoir. Ah ! les mauvaises mazettes !

LA PRINCESSE

, en riant.

Tu es un historien bien exact.

ARLEQUIN

Oh ! quand je compte quelque chose, je n’oublie rien ; bref, tant y a que nous arrivâmes ici, mon maître et moi. La Grandeur de Madame l’a trouvé brave homme, elle l’a favorisé de sa faveur ; car on l’appelle favori ; il n’en est pas plus impertinent qu’il l’était pour cela, ni moi non plus. Il est courtisé, et moi aussi ; car tout le monde me respecte, tout le monde est ici en peine de