Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 2.djvu/525

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
515
SCÈNE X.

yeux sont mouillés de larmes ! Il paraît désolé ! Que lui est-il donc arrivé ?

MADAME AMELIN

Rien que de fort heureux, quand il sera raisonnable. Au reste, madame, j’allais vous informer que nous sommes sur notre départ, Araminte, mon neveu et moi. N’auriez-vous rien à mander à Paris ?

MADAME ARGANTE

À Paris ! Quoi ! est-ce que vous y allez, madame ?

MADAME AMELIN

Dans une heure.

MADAME ARGANTE

Vous plaisantez, madame ; et ce mariage ?…

MADAME AMELIN

Je pense que le mieux est de le laisser là. Le dégoût que vous avez marqué pour ce petit divertissement, qui me flattait, m’a fait faire quelques réflexions. Vous êtes trop sérieuse pour moi. J’aime la joie innocente ; elle vous déplaît. Notre projet était de demeurer ensemble ; nous pourrions ne nous pas convenir ; n’allons pas plus loin.

MADAME ARGANTE

Comment ! une comédie de moins romprait un mariage, madame ? Eh ! qu’on la joue, madame ; qu’à cela ne tienne ; et si ce n’est pas assez, qu’on y joigne l’opéra, la foire, les marionnettes, et tout ce qu’il vous plaira, jusqu’aux parades.

MADAME AMELIN

Non ; le parti que je prend vous dispense de cet embarras-là. Nous n’en serons pas moins bonnes