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vous reste plus que moi, Félicie, et peut-être nous séparons-nous aussi.


Scène VI

LA MODESTIE, FÉLICIE, LUCIDOR


FÉLICIE

À qui en avez-vous ? à qui en a-t-elle ? Dites-moi donc le crime que j’ai fait ; car je l’ignore ! De quoi s’est-elle fâchée ? De quoi l’êtes-vous ? Où cela va-t-il ?

LUCIDOR

Si le plaisir qu’on sent à vous voir la chagrine, sa peine est sans remède, Félicie ; mais n’y songez plus, nous nous passerons bien d’elle.

FÉLICIE

Il est pourtant vrai que, sans vous, je l’aurais suivie, Seigneur.

LUCIDOR

Vous repentez-vous déjà d’avoir bien voulu demeurer ? Que nous sommes différents l’un de l’autre ! Je ferais ma félicité d’être toujours avec vous : oui, Félicie, vous êtes les délices de mes yeux et de mon cœur.

FÉLICIE

À merveille ! voilà un langage qui vient fort à propos ! Courage ! si vous continuez sur ce ton-là, je pourrai bien avoir tort d’être ici.

LUCIDOR

Eh ! qui pourrait condamner les sentiments que j’exprime ? Jamais l’amour offrit-il d’objet aussi charmant que vous l’êtes ? Vos regards me pénètrent ; ils sont des traits de flamme.

FÉLICIE

, impatiente.

Je vous dis que ces flammes-là vont encore effaroucher ma compagne.

La Modestie paraît sombre.