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ÉGLÉ.

Un camarade qu’il a découvert tout nouvellement, et qui s’appelle homme.

CARISE.

Et qui est aimable ?

ÉGLÉ.

Oh ! charmant, plus doux qu’Azor, et qui proposait aussi de demeurer pour me tenir compagnie ; et ce fantasque d’Azor ne lui a permis ni la main ni la compagnie, l’a querellé, l’a emmené brusquement sans consulter mon désir. Ah ! ah ! je ne suis donc pas ma maîtresse ? Il ne se fie donc pas à moi ? Il a donc peur qu’on ne m’aime ?

CARISE.

Non ; mais il a craint que son camarade ne vous plût.

ÉGLÉ.

Eh bien ! il n’a qu’à me plaire d’avantage ; car s’il est question d’être aimée, je suis bien aise de l’être, je le déclare, et au lieu d’un camarade, en eût-il cent, je voudrais qu’ils m’aimassent tous ; c’est mon plaisir ; il veut que ma beauté soit pour lui tout seul, et moi je prétends qu’elle soit pour tout le monde.

CARISE.

Tenez, votre dégoût pour Azor ne vient pas du tout de ce que vous me dites là, mais de ce que vous aimez mieux à présent son camarade que lui.

ÉGLÉ.

Croyez-vous ? Vous pourriez bien avoir raison.