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ÉGLÉ

Adorez donc, mais donnez-moi le temps de respirer ; ah !

CARISE.

Que de tendresse ! j’en suis enchantée moi-même ! Mais il n’y a qu’un moyen de la conserver, c’est de nous en croire ; et si vous avez la sagesse de vous y déterminer, tenez, Églé, donnez ceci à Azor ; ce sera de quoi l’aider à supporter votre absence.

ÉGLÉ

Comment donc ! je me reconnais ; c’est encore moi, et bien mieux que dans les eaux du ruisseau ; c’est toute ma beauté, c’est moi ; quel plaisir de se trouver partout ! Regardez Azor, regardez mes charmes.

AZOR.

Ah ! c’est Églé, c’est ma chère femme ; la voilà, sinon que la véritable est encore plus belle.

(Il baise le portrait.)
MESROU.

Du moins cela la représente.

AZOR.

Oui, cela la fait désirer. (Il le baise encore.)

ÉGLÉ.

Je n’y trouve qu’un défaut ; quand il le baise, ma copie à tout.

AZOR, prenant sa main qu’il baise.

Ôtons ce défaut-là.

ÉGLÉ.

Ah çà ! j’en veux autant pour m’amuser.

MESROU.

Choisissez de son portrait ou du vôtre.