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FRONTIN

Oui, Monsieur, dites toujours : je l’adore ; ce mot-là vous portera bonheur.

ROSIMOND

L’ingrate !

MARTON

Vous avez tort ; car il faut que je me fâche à mon tour. Est-ce que ma maîtresse se doute seulement que vous l’aimez ? jamais le mot d’amour est-il sorti de votre bouche pour elle ? Il semblait que vous auriez eu peur de compromettre votre importance ; ce n’était pas la peine que votre cœur se développât sérieusement pour ma maîtresse, ni qu’il se mît en frais de sentiment pour elle. Trop heureuse de vous épouser, vous lui faisiez la grâce d’y consentir : je ne vous parle si franchement, que pour vous mettre au fait de vos torts ; il faut que vous les sentiez : c’est de vos façons dont vous devez rougir, et non pas d’un amour qui ne vous fait qu’honneur.

FRONTIN

Si vous saviez le chagrin que nous en avions, Marton et moi ; nous en étions si pénétrés…

ROSIMOND

Je me suis mal conduit, j’en conviens.