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Laodice est aimable, et je ne pense pas
Qu’avec indifférence on pût voir ses appas.
L’hymen doit me donner une épouse si belle ;
Mais la gloire, Amilcar, est plus aimable qu’elle :
Et jamais Annibal ne pourra s’égarer
Jusqu’au trouble honteux d’oser les comparer.
Mais je suis las d’aller mendier un asile,
D’affliger mon orgueil d’un opprobre stérile.
Où conduire mes pas ? Va, crois-moi, mon destin
Doit changer dans ces lieux ou doit y prendre fin.
Prusias ne peut plus m’abandonner sans crime :
Il est faible, il est vrai ; mais il veut qu’on l’estime.
Je feins qu’il le mérite ; et malgré sa frayeur,
Sa vanité du moins lui tiendra lieu d’honneur.
S’il en croit les Romains, si le Ciel veut qu’il cède,
Des crimes de son cœur le mien sait le remède.
Soit tranquille, Amilcar, et ne crains rien pour moi.
Mais sortons. Hâtons-nous de rejoindre le roi ;
Ne l’abandonnons point ; il faut même sans cesse,
Par de nouveaux efforts, combattre sa faiblesse,
L’irriter contre Rome ; et mon unique soin
Est de me rendre ici son assidu témoin.