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Il se lasse vite. Pour moi, il me semble que je ne me lasserais pas. Il me semble même que j’éprouverais un vif plaisir à ces résistances. Ah ! si M.  le Curé voulait seulement me laisser un peu plus de champ ! Et je ne demanderais pas honteusement, ah ! non ! mais hardiment, les yeux dans les yeux, le droit des pauvres.

Quant à ce peu de charbon qui reste, pourquoi M.  le Curé le réserve-t-il à notre usage P Je ne suis pas sentimental, on ne m’émeut pas facilement, mais chacun de ces gosses bleuis, ce matin, exigeait qu’on prît à la lettre certaines paroles des Evangiles. Je n’ai pas osé manger devant eux cette soupe au lait bien chaude que tous les jeudis la mère Bisî son m’apporte du presbytère. Nous sommes sortis sur la grand’route et nous avons couru ensemble. « M’sieu l’Abbé, ah ! pas si vite, ah ! pas si vite ! » J’ai dû, sans le savoir, les forcer un peu. J’avais moi-même un point de côté. « M’sieu l’Abbé ! » Je n’aime pas trop qu’ils m’appellent ainsi. La façon, surtout, dont ils disent : monsieur, m’exaspère. J’aimerais qu’ils en usent envers moi avec un peu plus de respect. Je ne suis pas leur camarade, et il n’est pas question, il ne sera jamais question qu’ils fassent avec moi ce qu’ils-ont fait avec mon prédécesseur, le si timide abbé Videcoq. Ils lui grimpaient sur le dos, à ce que m’a dit la mère Bisson, et l’obligeaient a partager avec eux le