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« Mon cher enfant, ce n’est pas à nous à juger. Dieu seul connaît quels sont les siens. Faites-moi la grâce de ne point parler de cette affaire dans votre sermon. Soyez prudent aussi, dans vos conversations… » Il se leva. Il était tout congestionné. Il était gras et rond au delà de ce que je croyais. Que Dieu me pardonne, mais je revis soudain un des portraits de Renan vieux. Monsieur le Curé essuya un peu sa soutane, posa son cigare sur le petit guéridon de marbre, et sonna : « Madame Bisson, vous apporterez les liqueurs. » Je ne sus pas refuser le petit verre de calvados. Il le faudra pourtant si je veux tenir bon. « Mon cher enfant, vous aurez après-demain l’inhumation de madame Lasnel, inhumation de deuxième classe. J’ai prévenu le père Guyon. Fussien sera là, avec Dantan. Ah ! il nous faudra deux enfants de chœur de plus !… Demain donc, cette inhumation… — Après-demain, Monsieur le Curé. — Oui, après-demain, c’est juste, c’est juste… et vendredi ? Qu’est-ce donc qu’il y a vendredi ? Ah ! oui, j’y suis, un service en mémoire de la famille Turquet-Duval… Dites-moi, est-ce qu’il y a encore du vin à la sacristie ? »

Telle est la conversation ordinaire avec Monsieur le Curé. Il est impossible de parler sérieusement, et la théologie ne l’intéresse pas plus que le plain-chant. Il n’aime, je crois, que les enfants du catéchisme.