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pour moi, toute forme sûre m’échappe et je n’ai plus rien dans les mains dont je puisse dire : regardez-le. Les fruits se sont dissous dans l’herbe, les feuilles sont mortes et tombées. J’assemble à présent des branches sèches. Pour quelle hutte, vaine à vos yeux ? pour quelle cabane qu’emportera le vent ? Je ne suis plus qu’un homme qui fait semblant. Pourtant, François, dans la hutte si fragile, tellement sensible aux frémissements de la nuit, s’abrite déjà, ou tente de s’abriter, le clair esprit tombé des mains d’un dieu, et cet hiver, moins que la mort de ce qui fut et son repos parfait dans l’éternel, est la naissance de ce qui est. La nuit se creuse à l’infini. Les mages ont scruté le ciel. Bientôt ils se mettront en route, et quelquefois, penchés sur les citernes, lisant en elles des signes trop lumineux… — François, ayez confiance tout de même en ce vieil homme : s’il bégaie misérablement, c’est qu’il commence d’apprendre une autre langue.

Une seule question se pose dans le monde, et elle est aussi vieille que l’homme, et elle est peut-être tout l’homme : la question de la connaissance. Nous sommes faits pour la connaissance. Il ne s’agit que de savoir quelle lumière nous pouvons supporter et ce que nous devons faire de la lumière. Il y a ceux qui vivent dans l’ombre et qui, tentés, s’approchent des lampes, mais leur vie était faite pour l’ombre, pour la facile rumination de reflets et