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Elle n’est restée que quelques minutes avec nous. Comme je me disposais à partir, mademoiselle de Saint-Englebert m’a dit : « Vous êtes donc si pressé, monsieur l’Abbé ? Vous n’avez donc pas une minute pour entendre un disque ? » À la vérité, j’étais en effet un peu pressé : c’était mercredi soir et j’avais à confesser pas mal de gamins ; j’aurais dû refuser, mais il est difficile de refuser un disque de Solesmes. Nous avons écouté le Salve Regina, et nous sommes restés, après cela, assez longuement silencieux. Mademoiselle de Saint-Englebert avait la tête inclinée. Peut-être priait-elle ? Je n osai rompre ce silence. Elle se leva, alla vers un petit secrétaire, en sortit un carnet, et me dit : « Monsieur l’Abbé, je pense, depuis quelques jours, que je dois vous faire connaître cela. Ce sont des notes. C’est — comment dire ? — une sorte de journal spirituel. Vous me direz tout bonnement ce que vous en pensez… Ce que vous en pensez… entendons-nous… Vous me direz si ces choses-là peuvent être écrites, si, les écrivant, je reste bien fidèle aux enseignements de l’Église. N’est-ce pas ? » Elle a une façon curieuse, et un peu autoritaire, de dire « n’est-ce pas ? » Sans doute mademoiselle de Saint-Englebert ressemble surtout à sa mère, mais elle a gardé de M.  de Saint-Englebert une fermeté de discours et d’allure dont on s’étonne chez une jeune fille.