jugement sur M. Rousseau. Il me semble, à me relire, avoir été, en quelque sorte, de complicité avec lui, sinon dans le péché, du moins dans la tentation. Oui, j’ai presque dit, ou tout au moins pensé, que M. Rousseau était sorti grandi de cette épreuve. Et ce n’est pas vrai. Il est devenu plus émouvant, voilà tout. Il a même emprunté aux puissances du mal je ne sais quelles magies, quelles séductions perverses. La repentance est belle, et la contrition, mais plus belle encore la force par quoi nous nous refusons à ce qui nous tente. Et ne nos inducas in tentationem, sed libera nos a malo…
Relisant hier dimanche, après vêpres, et comme il m’arrive quelquefois, les premières pages de ce journal, et passant de là aux toutes dernières, j’ai été étonné de mon changement de style. Je ne saurais dire si j’écris mieux et je n’ai jamais eu de prétentions littéraires, mais — et cette remarque me trouble encore — ma phrase s’est comme infléchie. Elle est languide et incertaine. Auparavant, j’avançais avec allégresse. Il y avait du vent autour de moi, la route sonnait dur sous mon pas. Il semble que je n’avance plus qu’avec de grandes précautions. Il semble que je flâne et que je ne sache plus bien… où je vais. Mais si, tu sais où tu t’en vas. Là-dessus, en toi rien