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LA VILLE CHARNELLE

les aux sabots foudroyants, revolvers hystériques et bombes dansantes traversèrent en furie les prairies parfumées et plantées de femmes printanières qui ondoyaient sur leurs tiges élégantes, comme des fleurs chapeautées de papillons. Et les chapeaux ailés furent balayés par le coup de vent du démarrage. Les femmes en fleur jetèrent aux chauffeurs frénétiques leurs bagues, leurs bracelets et leurs colliers de pétales. Des antilopes et des gazelles vêtues de rose et de lilas leur offraient de loin leurs lèvres éclatées de chaleur et leurs yeux frais et mûrs.

Mais les nuées gonflées d’orage crevèrent tout à coup, et une averse cataracta sur la route goudronnée, qui luisait à l’infini, alléchante glissière !…

Bientôt ce ne fut plus qu’un fleuve de boue violente où brusquement apparut la Mort, sur son torpilleur funèbre filant à toute vapeur.

On ne voyait que le globe de son scaphandre noir vitré de diamants qui émergeaient hors du capot ; car