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LA MORT ET LA LUNE

tremblaient d’angoisse en la voyant si frêle,
se coloraient d’amour en la voyant si belle,
sous les baisers sournois de la brise lascive.

Et cependant, elle dansait, en répandant
au loin sa voix d’azur mouillée par le silence
et la tendresse humaine de la nuit…
si bien qu’en les voltiges de la danse,
ses fraîches sandales de turquoise,
effleuraient de langueur et de délices
les joues halées des vieux marins,
en extase, assoupis dans la hune,
sous le rêve élargi des voiles désirantes.

Mais, tout à coup, la Lune, comme une enfant,
trébucha sur les drisses,
et tomba de très haut, la tête la première,
blessant et déchirant sa chair sur les cordages.
Son corps s’est écrasé sur la proue noire,