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sur les sentiments intérieurs de celui-ci, il lui parla en ces termes pour le porter à se corriger : « Écoutez-moi, mon frère Jean, et recevez avec docilité un avis que je veux vous donner, et qui vous sera d’une grande utilité si vous voulez en profiter. Vous êtes tenté, et c’est par le démon de l’avarice, car je l’ai vu. Si vous recevez bien l’avertissement que je vous fais, vous accomplirez avec perfection l’œuvre de Dieu en ce lieu-ci. Vous deviendrez célèbre ; et les jugements de Dieu n’approcheront point de vous ; au contraire, si vous ne vous rendez pas à ma remontrance, vous tomberez enfin dans la maladie de Giezi, dont vous avez déjà contracté le péché.

Le disciple, au lieu de mettre à profit cet avis salutaire, ne pensa pas à s’amender, et ce qui lui avait été prédit arriva ; car, le saint étant mort, Jean fut fait prêtre après lui ; mais le démon, qui avait aveuglé Judas par l’avarice, l’aveugla également, jusqu’à faire qu’il s’appropriait ce qui appartenait aux pauvres ; et enfin, quinze à vingt ans après la mort de saint Macaire, il se trouva si couvert de la lèpre qu’on nomme éléphantine, qu’on ne trouvait pas en tout son corps la largeur d’un doigt qui n’en fût gâté.

Voici des merveilles plus surprenantes, mais dont on ne doit pas être étonné dans un saint que Dieu avait donné dans ce temps-là pour faire éclater la grandeur de sa souveraine puissance.

Un homme ayant été accusé d’un meurtre dont il était pourtant innocent, s’enfuit dans sa cellule de peur d’être arrêté et puni comme coupable. Mais ceux qui le poursuivaient y arrivèrent bientôt après, protestant au saint que, s’ils n’emmenaient ce meurtrier pour en faire justice, ils étaient eux-mêmes en danger. L’accusé protestait qu’il était innocent, et la contestation fort vive de part et d’autre ne finissait point. Le saint voyant qu’en les laissant disputer da-