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recevoir ; mais mangez avec eux, et rendez ensemble des actions de grâces à Dieu. »

Après que saint Jean eut raconté ces exemples, il dit à Rufin et à ses compagnons que la conséquence qu’ils en devaient tirer était d’être bien persuadés que rien ne nous met tant en sûreté dans les dangers de cette vie que l’humilité, et que rien ne nous peut faire tomber plus dangereusement que l’orgueil. Il ajouta qu’on doit se tenir sur ses gardes, de peur que le démon ne nous tente par de vaines ou de mauvaises pensées, et qu’une des raisons pour lesquelles les solitaires ont coutume, quand quelqu’un vient les voir, de commencer par la prière, c’est afin de dissiper, par l’invocation du nom de Dieu, les illusions du démon.

Il les entretint ainsi durant trois jours par ces discours et d’autres semblables dont ils se sentirent fortement animés ; et lorsqu’ils lui demandèrent sa bénédiction en prenant congé de lui, il leur dit : « Allez en paix, mes enfants ; sachez qu’aujourd’hui sont arrivées à Alexandrie les nouvelles de la victoire que le religieux prince Théodose a remportée sur le tyran Eugène. Mais ce grand empereur mourra bientôt d’une mort naturelle. » Ce qu’ils surent peu de jours après être véritablement arrivé, ainsi qu’il l’avait prédit.

Quant à lui, il mourut bientôt après la visite de Rufin, qui dit qu’à quelques jours de là il apprit, par des frères qui vinrent le rejoindre, que ce grand serviteur de Dieu était mort en cette sorte : il passa trois jours de suite sans se laisser voir à personne, et étant à genoux et en oraison il rendit son esprit à Dieu. On croit que ce fut au mois de septembre ou d’octobre de l’an 394.