Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/52

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

commis. Les démons, enragés de voir en lui un si heureux changement, lui déclarèrent une cruelle guerre, non-seulement par de fortes tentations dont ils l’affligèrent, mais encore en le frappant impitoyablement, lui causant des douleurs inexprimables. Cependant il demeura ferme et inébranlable dans ses bonnes résolutions, et ce qui le soutint principalement fut la profondeur de son humilité, et les vifs sentiments de componction qu’il entretint toujours dans son âme. Il parvint par ce moyen à une si éminente vertu, que dans tous les pays on ne le regarda plus que comme un ange, chacun disant, dans l’admiration où l’on était de sa piété, qu’un changement si extraordinaire ne pouvait être fait que par la main du Très-Haut. (Ps. lxvii.) Son exemple fut même si puissant, qu’il servit de modèle de conversion à plusieurs grands pécheurs ; et d’autres qui, après avoir bien vécu, avaient eu le malheur de se pervertir, et n’osaient plus, par désespoir, revenir de leur égarement, se relevèrent de leur chute.

Nous détaillerons ici toutes les circonstances du troisième exemple, parce qu’elles renferment un fond d’instruction très-utile et très-édifiant. « Un anachorète, dit le saint, qui demeurait dans le lieu le plus reculé de ce désert, y ayant passé plusieurs années dans une vie très-austère, et commençant à devenir vieux, son âme se trouva parée des plus excellentes vertus, et élevée au comble de la plus haute perfection que puisse acquérir un solitaire. S’employant donc ainsi tout entier au service de Dieu par les oraisons qu’il lui adressait et les hymnes qu’il chantait à sa louange, Dieu, pour commencer à le récompenser dès cette vie de sa fidélité, le déchargea du soin de sa nourriture et y pourvut par sa providence, lui faisant trouver miraculeusement sur sa table un pain d’une bonté et d’une blancheur admirables, dont ce bon religieux