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Ces nouveaux prodiges lui attirèrent les honneurs qu’il craignait, et pour les éviter il prit le chemin d’Alexandrie, dans l’intention de passer de là dans le vaste désert d’Oasis ; et, comme il n’avait pas la coutume d’entrer dans les villes, il s’arrêta chez des solitaires de sa connaissance, du territoire de cette ville, qui demeuraient au bout du quartier appelé Bruchion. Ceux-ci le reçurent avec une joie inexprimable, se flattant qu’il demeurerait du moins quelque temps avec eux ; mais leur joie se changea en douleur quand ils apprirent de ses disciples qu’il allait partir dès le soir. Les uns se jetèrent à ses pieds, les autres se couchèrent sur le seuil de la porte, tous le conjurèrent de ne pas les quitter, lui protestant qu’ils mourraient plutôt que de souffrir d’être privés d’un tel hôte. Il les consola en leur disant qu’il se hâtait de partir pour ne pas leur attirer de fâcheuses affaires, et qu’ils verraient bientôt qu’il ne se trompait pas. Comme ils savaient qu’il était guidé par l’esprit de Dieu, ils n’osèrent s’opposer davantage à son départ, et le lendemain ils virent arriver des idolâtres de Gaze accompagnés des licteurs du préfet pour se saisir de lui, parce qu’ils avaient su qu’il était venu la veille à leur monastère, où les païens comptaient qu’il passerait quelques jours. Pour bien entendre ceci il faut savoir que, Julien l’Apostat ayant été fait empereur, les habitants de Gaze, obstinés dans leur idolâtrie jusqu’à la fureur, crurent ne pouvoir mieux lui faire leur cour que de lui présenter une requête contre le saint et contre Hésyque, son fidèle disciple, les accusant d’être magiciens, et demandant qu’ils fussent poursuivis et qu’on les fit périr. C’était aussi pour se venger contre saint Hilarion de l’affront qu’il avait fait à leur dieu Marnas, et des païens qu’il avait convertis. Ils obtinrent sans peine de ce prince, qui ne haïssait pas moins qu’eux les chrétiens, ce qu’ils désiraient ; et,