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épargner la douleur de le voir mourir, outre qu’il montrait par là qu’il mourait dans la communion de saint Athanase, l’invincible défenseur de la foi orthodoxe contre l’hérésie arienne.

À ces mots du manteau d’Athanase, Antoine reconnut encore plus que l’esprit de Dieu résidait en ce saint, puisqu’il ne pouvait savoir que par révélation que ce prélat lui avait fait présent de ce manteau. Il n’osa donc répliquer, et, se contentant de verser des larmes, il lui baisa les yeux et les mains, et partit pour son monastère.

Le désir de revoir saint Paul lui faisait faire plus de diligence : on eût dit que toute la vigueur de son esprit avait passé dans son corps usé. En arrivant à son monastère, ses disciples, que son absence avait mis en peine, vinrent au-devant de lui et lui demandèrent où il avait tant demeuré. Mais, au lieu de leur en rendre compte, rempli comme il était du souvenir des vertus de Paul, il frappait sa poitrine et disait avec componction : « Malheur à moi, misérable pécheur, qui porte si injustement le nom de solitaire ! J’ai vu Élie, j’ai vu Jean dans le désert, ou, pour mieux parler selon la vérité, j’ai vu Paul dans un paradis. »

Ces paroles excitèrent encore plus la curiosité de ses disciples, ils lui firent plus d’instances pour l’obliger à s’expliquer ; mais il ne leur répondit que par ces mots de l’Écriture : Il y a un temps de parler et un temps de se taire ; et, sans penser seulement à prendre aucune nourriture, il prit le manteau de saint Athanase, et se hâta d’aller joindre saint Paul, craignant, comme il arriva, qu’il ne mourût en son absence.

À peine avait-il marché trois heures, qu’il vit tout à coup saint Paul monter au ciel dans une éclatante lumière, au milieu des esprits bienheureux. « Ah ! s’écria-t-il en se jetant à terre et couvrant sa tête de sable, ah ! pourquoi m’abandonnez-vous ? pourquoi ne me