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de ce qu’elle raconte ou de ce qu’elle décrit ; elle se révèle pleinement, au contraire, dans tout ce qu’elle a composé : on la connaîtrait tout entière, si même il ne subsistait d’elle que ses romans. George Sand ne conçoit point, au reste, que le livre qu’on écrit puisse vous demeurer extérieur, n’être point vous-même : « Ne pas se donner tout entier dans son œuvre, écrit-elle à Flaubert en 1863, me paraît aussi impossible que de pleurer avec autre chose que ses yeux ou de penser avec autre chose que son cerveau. » (Correspondance, IV, p. 338.) Seulement, ce qui est en elle ne vient point d’elle-même ; elle est en réalité les choses et les gens parmi lesquels elle a vécu et qu’elle reflète passivement. En dépit des apparences, George Sand n’a que très peu médité, et c’est seulement à la fin de sa vie qu’elle a appris à réfléchir ; jusque-là elle n’a guère possédé en propre et bien à elle que ce don infini d’aimer qui attendrit son œuvre