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jamais peint la réalité, ou qu’elle ne l’a jamais peinte avec vérité ? Il faudrait, pour oser l’affirmer, ignorer son œuvre presque entière. Sans doute, c’est à travers son esprit, à travers ses émotions, ses sentiments, ses douleurs, ses joies, à travers tout cet infini mouvant d’images qu’elle portait en elle, qu’elle a vu le monde qui l’entourait, les arbres des champs et les maisons des villes, les bourgeois et les paysans. Mais peut-on voir avec d’autres yeux que les siens, et n’est-ce point une chimère qu’une œuvre d’art impersonnelle ? N’est-ce point toujours l’âme d’un écrivain qui s’exprime en un livre, et son imagination n’imprime-t-elle pas sa forme aux événements qu’il raconte, aux paysages qu’il décrit, aux caractères même qu’il analyse ? Composer, c’est choisir : qui guidera le romancier dans son choix, sinon ses préférences, ses goûts, la structure même de son esprit ? C’est une duperie que de vouloir transformer un