venu pour enlever sa fiancée du couvent où elle est retenue, la quitte terrassé par on ne sait quel occulte pouvoir, ne croyant pas assez dans le Dieu de ses pères pour tomber à genoux, ne croyant pas assez en lui-même et en son amour pour entraîner celle qu’un mot suffirait sans doute à faire tomber dans ses bras.
Mais le rôle du critique n’est pas celui du moraliste ; aux yeux du critique il ne s’agit pas de savoir quel pouvoir tonique peut posséder un livre pour l’esprit des lecteurs, mais quelle est sa valeur comme document psychologique sur un homme de génie et quelle est surtout sa valeur esthétique.
Or, on ne peut nier que la valeur esthétique des livres de Loti ne soit considérable. Si le talent d’un poète se mesure à la force avec laquelle il est capable de faire naître chez les autres les émotions que lui ont suggérées ses poèmes, peu de poètes sont mieux doués que Loti.
Pourtant, il y a lieu de s’étonner en lisant ses livres, non seulement de leur simplicité d’intrigue, mais de la simplicité de leur style. Le vocabulaire n’est pas moins rudimentaire que la syntaxe ; les seuls néologismes qu’on trouve sont empruntés à des langues exotiques, non par ostentation de polyglottisme mais parce que Loti connaît bien la valeur suggestive de ces mots étrangers, et que rien ne saurait remplacer cette émanation du génie d’un peuple qui est son langage. On peut d’ailleurs dire du style de Loti qu’il est suggestif avant tout. Les mots imprécis, les phrases inachevées y