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LAI DE L’ÉPINE

avoit conçues. Les deux chevaliers se doutent bien que le prince est venu garder le pas d’armes, pour donner des preuves de son courage, et remporter le prix décerné à la vaillance. Les combattants prennent leur écu, baissent la lance, et courent l’un sur l’autre. Dans cette attaque, leurs lances volent en éclats ; mais ils ne quittèrent pas la selle, tant ils étoient bons chevaliers ; seulement la force du coup ébranla si fortement leurs chevaux, qu’ils furent renversés. Ils mettent pied à terre et recommencent un combat terrible à l’épée, qui dura jusqu’à ce que le prince eût blessé son adversaire. Le chevalier, qui se tenoit à l’écart, vint alors séparer les combattants et interrompre la bataille. Les deux rivaux mirent leur épée dans le fourreau ; puis le chevalier, s’adressant au prince, lui parla en ces termes : Ami, montez à cheval et rompons encore une lance ; puis ensuite nous partirons, car il ne sera plus besoin de demeurer. D’ailleurs vous devez encore garder le pas d’armes jusqu’à ce que le jour soit venu. Si par hasard, dans cette nouvelle