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LAI DE GRAELENT

cette beauté admirable, le chevalier peut être assuré d’être mis en liberté et de ne point perdre les bonnes graces de son suzerain. Mais dans le cas contraire, ou en supposant que la dame si vantée ne vienne pas, le chevalier sera jugé et mis à la disposition du monarque, lequel fera exécuter le jugement.

Le chevalier quitte la cour dans un état impossible à décrire ; il monte son bon cheval, arrive à son hôtel son premier soin est d’appeler l’écuyer que lui avoit envoyé son amie. Jugez de sa peine, lorsqu’il ne le trouve point ; dans son désespoir il appelle la mort à son secours. Seul, dans une chambre écartée, il demande pardon à sa mie, la prie au nom de Dieu de lui parler ; mais la cruelle est inexorable, il ne la verra pas avant un an, et il n’en recevra aucun secours, qu’après avoir été sur le point d’être condamné à mort.

Le grand chagrin que ressent le chevalier de ce qu’il ne peut voir sa belle, fait qu’il n’a de repos ni jour ni nuit. Peu lui importe de sa vie, d’après une semblable perte.