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LAI D’ELIDUC.

et je ne sais que faire. J’aime tant le chevalier que j’en perds le repos et le sommeil. S’il veut m’aimer loyalement et me donner son cœur, mon bonheur sera de lui plaire. D’ailleurs quel heureux avenir pour lui, il sera roi de cette terre qu’il gouvernera sagement. S’il venoit à ne pas m’aimer ? Ah ! j’en mourrois de douleur. Quand la princesse eut terminé ses plaintes, le chambellan lui donna un conseil fort sage. Madame, puisque vous aimez le chevalier, assurez-vous s’il partage votre amour. Vous lui manderez que vous lui envoyez soit une ceinture, un ruban ou une bague ; s’il reçoit ce cadeau avec transport et qu’il soit joyeux de l’avoir, vous êtes sûre qu’il partage vos sentiments ; il n’est sous le ciel aucun souverain qui ne fût au comble de la joie, si vous le vouliez aimer. La demoiselle après avoir écouté son chambellan lui répondit : Comment pourrai-je avoir la certitude d’être aimée ? Je n’ignore pas qu’on n’a jamais vu faire pareille proposition à aucun chevalier. Dieux que je serois malheureuse s’il venoit à se moquer de moi ! Pourquoi n’exis-