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semblait pas intéresser outre mesure S. A. qui bâillait avec un sans-gêne moscovite.

— Assez, assez, Xenianine ! dit le prince en apercevant les épaulettes du général. Xenianine se tut et se dirigea vers la porte ; un signe du grand-duc le recloua immédiatement sur son siège.

Et levant à demi la tête vers Cerneano : — Qu’est-ce, Monsieur ? fit Nicolas avec ce ton sec qui lui était habituel lorsqu’il ne s’adressait pas à ses frères aînés.

Le général s’inclina respectueusement, mais sans servilité aucune. Son salut déplut au grand-duc qui qualifia, in petto, d’irrévérent le maintien digne du vieillard.

Cerneano exposa en peu de mots les motifs qui l’amenaient au quartier général ; le grand-duc l’interrompit avec un léger mouvement d’impatience.

— Je sais, je sais, Monsieur. Ceci est votre rapport ? demanda-t-il en avança la main : donnez-le-moi.

Dans l’armée russe, le knout remplaçait ou prévenait les rapports que le prince avait en exécration.

Il feuilleta rapidement le volumineux écrit de Leganesco et ses sourcils se rapprochèrent par degrés l’un de autre : le grand-duc était mécontent.

— Eh bien ! Monsieur, dit-il en passant le rapport à Xenianine, de quoi se plaint-on ? Ces deux hommes sont coupables. L’un a abandonné, de son propre chef, le poste qui lui avait été confié par un de vos officiers même ; l’autre a prononcé des paroles blessantes pour le prince Liatoukine qui, en ne leur faisant administrer qu’un nombre de coups aussi restreint, s’est encore montré très-indulgent.

Le grand-duc imprimait de fortes secousses au fauteuil du négociant anglais et les phrases tombaient une à une de ses lèvres comme des cailloux sur une plaque de