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— À ce compte-là, Zamfira n’est pas si pauvre non plus !

Une vive rougeur couvrit les joues de la Bohémienne. Elle sentit que les paroles de Ralitza étaient le premier éclair d’un orage qui allait se déchaîner sur sa tête. Mariora pâlit. — Zamfira ! fit-elle d’une voix concentrée, Zamfira ! Ah ! tant qu’un souffle de vie animera Maria Sloboziano, Mitica ne sera pas l’époux de Zamfira Mozaïs ! Et faisant un pas vers la Tzigane : — Ah ! tu veux être maîtresse dans la maison des Slobozianii ! Ah ! tu veux avoir des terres à toi ! Mais, dis-nous donc ce qu’est devenue la sœur Aleca ?

— Ale… Aleca ?…

— Ah ! tu ne te souviens plus d’Aleca qu’un magnat magyar a prise en croupe après l’avoir épousée comme on épouse les filles de la race ?

— Aleca est morte ! dit Zamfira d’une voix sourde, et mon père lui a pardonné !

— Et ton frère, le renégat, qui gardait jadis nos troupeaux et qui vend maintenant de la soie à Smyrne ; ton frère qui se nommait Serban et qui s’appelle Yézid, ton frère, enfin, qui naquit chrétien et qui, aujourd’hui, n’est plus qu’un chien de païen… s’il n’est déjà mort et damné !

Hélas ! tout cela était vrai ; Zamfira ne trouvait rien à objecter et de grosses larmes roulaient dans ses yeux.

— Mariora ! supplia-t-elle. Mariora était inflexible.

— Et ta mère ! poursuivit-elle avec mépris, la Nadejde que chacun pouvait voir danser pour cinquante bani !… [1]

— Ma mère ! s’écria Zamfira tremblante d’indignation.

  1. 50 centimes.