généreuses. Il se souvint qu’un soir Mariora lui avait dit : « Mon Ionitza, si j’étais infidèle, me tueriez-vous bien avec votre grand sabre, moi… et l’autre ?… — Toi ? non ; l’autre ? certes ! » avait-il répondu.
Liatoukine était mort, Isacesco épargnerait Mariora.
— Le crime cherche toujours le criminel ![1] se dit-il, et Isacesco ne sera jamais le nom d’un assassin. Il enleva Spérantza dans ses bras et l’embrassa avec frénésie.
— Mon bon ami, dit-elle, tu me fais mal. Je t’aime bien, continua-t-elle en prenant un air sérieux qui contrastait avec l’expression habituelle de sa figure mutine. Où vas-tu ? je t’accompagnerai.
— Où je vais, ma pauvre enfant ? Hélas ! je n’en sais rien moi-même !
Spérantza écarquilla ses yeux noirs : — Tu n’as donc pas de maison ? fit-elle.
— Je n’en ai plus.
— Et ton père ? et ta mère ?
Ioan secoua la tête.
— On les a mis sous la terre, n’est-ce pas ? dit-elle gravement ; alors, c’est qu’ils sont morts, mon bon ami !
— Ils sont morts, oui ! répéta machinalement Ioan.
Spérantza eut une idée. — Viens avec moi, s’écria-t-elle, je te conduirai chez nous.
Ce n’est pas grand, chez nous, ajouta-t-elle en manière d’explication, mais tu ne tiens pas beaucoup de place.
— Que Dieu te garde, Spérantza ! dit-il tout attendri : Où tu iras, j’irai !
Spérantza lui saisit la main, il se laissa guider par elle, heureux de la suivre et de l’entendre babiller. Spé-
- ↑ Proverbe roumain.