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les forçats du mariage

fille gauche, sans esprit ; vous m’intimidez beaucoup.

— Je vous trouve charmante.

— Quand je vous regarde, vous souriez ; mais depuis quelques jours, dès que vous croyez n’être pas observé, vous paraissez triste, soucieux. Sachez, monsieur, que je vois très-bien derrière mon dos.

— C’est là, dit-on, un privilége tout féminin. Cependant vous pourriez vous tromper quelquefois.

— Oui, mais pas quand nous avons une glace devant nous. Ainsi, tout à l’heure, lorsque j’essayais ce bijou, au moment où vous êtes entré, vous fronciez le sourcil ; vous aviez l’air presque sombre, et mon cœur s’est serré douloureusement.

— Je vous en demande pardon, chère Marcelle. Je ne vous pardonnerai qu’à une condition : dites-moi ce à quoi vous pensiez.

— Je ne me souviens plus. Dans ce moment-ci, je pense que je vous adore, voilà tout.

— Monsieur, insista Marcelle, avec une petite moue d’enfant gâtée, je veux savoir tout de suite, mais tout de suite, la cause de votre air chagrin.

— Voyons, puisque vous l’exigez, je vais tâcher de me souvenir. D’abord, je vous aime, et les grands amours, comme les grands bonheurs, rendent mélancolique ; et puis je vais prendre des engagements très-graves.

— Est-ce qu’ils vous pèsent déjà ?

— Non, mais c’est fort sérieux. Enfin, les soucis