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les forçats du mariage

grand’mère de Juliette le reçut d’un air sévère et hautain.

— Je ne sais au juste, monsieur, lui dit-elle, ce qui s’est passé entre vous et ma petite-fille ; mais ses révélations et les divagations du délire m’ont appris qu’elle vous aimait, et que votre mariage prochain a seul causé sa maladie. Vous mariez-vous réellement, ou votre intention est-elle d’épouser Juliette ?

— Madame, répondit Robert atterré, j’aime Mlle Delormel d’une affection très-vraie, et c’est pourquoi je refuse de l’épouser. Je suis complètement ruiné. J’ai de plus 600,000 fr. de dettes. Vous même, voudriez-vous condamner votre petite-fille à la misère et à un malheur certain ?

— Alors, monsieur, ne cherchez pas à la revoir. Le médecin défend toute émotion vive.

Robert s’inclina et sortit.

Il fut vivement affecté du congé que lui signifiait Mme de Brignon, car il ressentait pour Juliette, non seulement une passion vive, mais un sérieux attachement. Il avait eu des torts. Comment pourrait-il les réparer, maintenant qu’il était à jamais séparé d’elle ?

Il lui fallut toute son insoucieuse philosophie pour chasser le remords et le chagrin qui par instant l’obsédaient. La tendresse calme de Marcelle l’aida aussi à apaiser la vivacité de ses regrets. Elle l’aimait avec une ardeur et des élans si purs !