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les forçats du mariage

— Mes amis, buvons à l’amour toujours jeune, parce qu’il est inconstant : buvons à tous les amours ; aux amours d’un jour, aux amours d’une heure ; buvons même aux amours éternels, puisque la haute antiquité nous en fournit quelques exemples ; buvons aux amours vrais ; buvons encore aux amours trompeurs, ce sont quelquefois les plus vifs. Ô mes gais amis, mes charmantes amies, aimez-vous les uns les autres ; c’est Dieu lui-même qui l’a dit, et par le fait, il n’y a que cela de vrai et de bon dans la vie. Croyez-en un quasi revenant, qui a déjà les deux pieds dans le tombeau du mariage.

Nana jeta ses bras au cou de Robert.

— Bravo ! hourrah ! sur la table Robert et Nana !

D’un bond, tous deux s’élancèrent. Robert poussa du pied les corbeilles de fleurs, les pyramides de fruits. Porcelaines de Saxe et cristaux de Bohême volèrent en éclats.

C’étaient des cris, des trépignements. On s’embrassait. Les uns pleuraient, les autres se balançaient, hébétés par l’ivresse. Quelques-uns roulaient sur le tapis.

Nana et Robert exécutèrent sur la table une danse insensée.

Et Juliette était là, l’œil hagard, assistant à cette scène, qui lui paraissait une sorte de fantasmagorie infernale. Quel attrait la retenait donc clouée à sa place ? Était-ce simplement la curio-