Page:Marie Louise Gagneur Les Forcats du mariage 1869.djvu/393

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
387
les forçats du mariage

on. Mais la séparation, aussi bien que le divorce, ne brise-t-elle pas pour eux la vie de famille ? Je prétends, moi, que la séparation est aussi douloureuse pour les enfants que pour les parents, qu’elle leur fait une situation aussi fausse. Vous le voyez bien : votre enfant, aujourd’hui, a failli rougir de vous, parce que votre position est équivoque, et la sienne aussi. Vous le voyez bien : malgré la pureté de votre vie, vous serez toujours soupçonnée, votre vertu sera toujours suspecte. Vous avez beau n’être que victime, le monde vous traite en paria ; vous êtes une sorte de déclassée. Que sont donc les vils intérêts d’argent que prétend sauvegarder le Code, à côté des droits du cœur, à côté de l’honneur ? N’est-elle pas inique, immorale, flétrissante, au lieu d’être protectrice, cette loi qui ne rompt que la communauté des intérêts, et qui laisse subsister, quand elle ne la crée pas, la communauté du déshonneur ?

Ils avaient souvent ensemble abordé cette question ; mais jamais Marcelle n’avait entendu Étienne s’élever avec cette véhémence contre la loi qui les vouait l’un et l’autre à un malheur irréparable, éternel.

— Ce n’est pas seulement la loi civile, objecta Marcelle timidement, c’est la loi religieuse, mon ami, qui s’oppose au divorce.

— La loi religieuse ! Je respecte votre foi, ma-