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les forçats du mariage

voix étouffée. Depuis que je vous connais, je souffre par vous. Vous avez fait de moi la dernière des femmes. Savez-vous ce que je suis ? Savez-vous où m’a poussée votre abandon ? Je suis…

Elle s’arrêta, rejeta des deux mains ses cheveux en arrière. Elle se leva et s’éloigna de Robert.

— Non, n’achevez pas, Juliette. J’ai peur de comprendre, dit Robert en jetant un regard sur les splendeurs de l’appartement.

— Que comprenez-vous ? fit-elle en le toisant fièrement.

Il se rapprochait.

— N’avancez pas. Il n’y a plus rien de commun entre nous. Adieu !

Elle voulut se retirer ; mais des liens irrésistibles l’enchaînaient à sa place. Elle fit pourtant quelques pas, chancelante, alanguie.

Sa figure pâle, émue, était alors d’une beauté si souveraine, que Robert, lui aussi, invinciblement attiré, s’élança vers elle, la prit dans ses bras, la ramena au divan, se prosterna à ses pieds, couvrit ses mains de baisers violents.

Enveloppée, aveuglée par les flammes de cet amour, qu’elle ne pouvait vaincre, Juliette pardonna.