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les forçats du mariage

née, elle aussi, par le hasard des circonstances. Qu’est-ce que la vie après tout, puisqu’un accident si mince peut la briser ? L’importance que les hommes attachent à l’existence, tient à leur immense orgueil. Que sommes-nous, hélas ! dans le mouvement universel ? Qui donc s’apercevra que demain j’aurai cessé d’exister ?

— Ah çà ! Robert, parles-tu sérieusement ?

— Très-sérieusement.

— Je suis inquiet de t’entendre discourir ainsi ; car j’ai remarqué que tu ne raisonnes jamais que lorsque tu vas commettre une sottise.

— C’est sans doute, répliqua Robert en souriant tristement, parce que j’ai besoin de me prouver à moi-même que cette sottise est chose raisonnable.

— Voyons, tâchons de causer sensément. Plaie d’argent, dit-on, n’est pas mortelle. Diable ! comme tu y vas ! se tuer parce qu’on n’a plus que 25,000 fr. de rente ! Si tous ceux qui ne les ont pas, se brûlaient la cervelle, combien resteraient debout ? Dis-moi que tu éprouves un moment d’ennui, difficile à passer.

— Non, ce n’est pas cela seulement. D’ailleurs, il ne me reste même pas ces 25,000 fr. de rente ; car j’ai encore des dettes, et le sieur Rabourdet se propose de plaider en séparation.

— Ta femme n’y consentira pas.

— Eh bien ! quoi ? Tu veux que je continue à