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les forçats du mariage

Alors, le prenant pour confident, elle lui conta ses douleurs, ses ennuis, colora sa conduite des plus beaux sentiments, et lui protesta de sa reconnaissance sans bornes pour le service si désintéressé qu’il lui rendait.

L’aimable Rabourdet, subjugué par ce langage élevé et sentimental, par ces manières de princesse, qu’elle savait si bien prendre, était ému au point de sentir ses yeux se mouiller.

Il eût voulu mettre sa fortune entière aux pieds de Juliette ; il y mit son cœur, sa vie, un dévouement à toute épreuve, accompagnés d’une lettre de crédit illimité sur son banquier.

Juliette accepta, la rougeur au front et des larmes de honte dans les yeux. Elle maudit de nouveau sa douloureuse destinée, qui la forçait de recourir ainsi à la générosité de ses amis. Mais Étienne ne la laisserait pas sans ressources. Elle s’acquitterait bientôt, et elle ne profiterait de ces offres qu’avec une grande réserve et dans la mesure de ce qu’elle pourrait rendre.

— Elle mit une grâce si touchante dans ses remercîments que Rabourdet la quitta, enivré et rajeuni. En effet, l’amour de cette belle femme, de cette perle incomparable, le dédommageait de ses ambitions déçues. C’était une consolation inespérée. L’idée de supplanter son gendre, dont il avait à se plaindre, accrut encore l’ivresse qu’il ressentait de son futur triomphe ; car l’abandon avec lequel Ju-