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les forçats du mariage

l’ose pas. Elle est encore sublime de résignation, de dévouement ; mais on sent qu’elle n’accomplit qu’un devoir. Le saint enthousiasme est éteint.

— Elle ne t’aime plus ?

— J’en ai peur.

— Alors reviens à elle sincèrement, reconquiers son amour.

— Que veux-tu que j’en fasse ? Je l’ai cependant essayé une fois ou deux, et sais-tu à quelle humiliation je me suis exposé ? Dès que je l’aborde avec tendresse, immédiatement elle me parle d’affaires. La chère créature a deviné que je ne l’avais épousée que pour sa fortune. Et maintenant elle croit que chacune de mes protestations est intéressée. En un mot, je sens qu’elle me méprise, et je n’ai pas le droit de m’en offenser.

— En effet, tu n’es guère non plus sur un lit de roses.

— Ce n’est pas tout, voilà Juliette qui me tombe sur les bras.

Mme Moriceau ! exclama Pierre Fromont avec un soubresaut.

— Oui, elle m’écrit qu’elle quitte son mari, qu’elle s’enfuit sans un sou, et elle me demande de lui prêter de l’argent, — elle s’adresse bien ! — et d’aller l’attendre au Havre.

— Comment ! elle arrive bientôt ?

— Dans huit jours. Or, je ne me soucie pas de renouer une intrigue avec elle. Je ne puis aucune-