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les forçats du mariage

— Tiens ! tu n’es donc son amant que depuis bien peu de jours ?

— Tu refroidirais un volcan avec tes raisonnements à la glace.

— Ce qu’il y a de beau en toi, Robert, ce qui tranche avec notre jeunesse blasée, terne, vieillotte, c’est ton enthousiasme qui survit à toutes les débauches, à toutes les déceptions.

— Je ne me fais aucune illusion sur ce nouvel amour. J’ai aimé Juliette enfant, je l’ai aimée jeune fille, je l’aime femme. Je commence à croire que je l’aimerai toujours.

— Ce serait alors une femme habile.

— Au contraire : ce qui assure sa puissance sur moi, c’est qu’elle ne connaît aucune de ces ficelles féminines que je sais par cœur, et qui ne me prennent plus. Elle suit sa passion avec une spontanéité, une violence qui vous étonne, vous déroute.

— Alors, il se peut que cela dure… trois mois. L’imagination est prise et le cœur, un peu.

— Mon cœur est tout à elle.

— Et ta femme ?

— Je l’aime encore, mais autrement.

— Quel avenir tu te prépares entre ces deux femmes exigeantes et jalouses !

— C’est la vie, cela. J’aime les situations tendues qui me forcent à exercer toutes mes énergies.

— Et cet homme-là s’est marié, il est père de famille ! C’est comme moi, si j’avais des enfants !